ps chevilly larue

Il y a vingt ans… Le Printemps de Pékin

jeudi 7 mai 2009 par B.TRANCHANT

Du 15 avril au 4 juin 1989, des manifestations enflamment la place Tienanmen. En l’espace de quelques jours, Pékin s’embrase. Les mouvements d’étudiants, d’intellectuels et d’ouvriers dénoncent, d’un seul tenant, la corruption qui sévit dans le pays et réclament, sans plus tarder, des réformes politiques de fond. Vingt ans après, ces évènements sont toujours un sujet tabou en Chine.

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L’image restera à jamais gravée dans les mémoires. Celle d’un étudiant chinois usant de son corps pour faire barrage à un char. La scène se déroule à Pékin, le 5 juin 1989, à deux pas de la place Tienanmen, au sud de la Cité interdite. Au deuxième jour des violentes répressions d’un gouvernement aux abois qui a proclamé l’état de siège et fait intervenir l’armée, la veille. Depuis le 15 avril, la capitale de la République populaire de Chine est la scène d’affrontements quotidiens entre l’armée et les mouvements d’étudiants, d’intellectuels et d’ouvriers qui dénoncent d’une même voix la corruption et réclament des réformes d’urgence. Les premiers pointent, en particulier, l’insécurité qui règne dans les campus et le manque de débouchés dans les villes du littoral. Les enseignants réclament, pour leur part, un meilleur traitement, pendant que les intellectuels font circuler tracts et pétitions pour obtenir la libération des prisonniers politiques.

Genèse

Ces revendications ont reçu un écho favorable auprès de proches de Deng Xiaoping, le Secrétaire général du Parti communiste chinois (PCC). Nombreux sont ceux qui revendiquent haut et fort la liberté d’association et une réelle transparence en matière de revenus. Le décès de l’ex-Secrétaire général du PPC, Hu Yaobang, le 15 avril, admiré pour son courage et son sens des réformes, accélère le mouvement. Le lendemain, des manifestations spontanées s’organisent, place Tienanmen, pour obtenir la réhabilitation du défunt, limogé en 1987. Le 18, plusieurs milliers d’étudiants organisent un sit-in devant le Grand Palais du Peuple, avant une tentative d’immixtion du Zhongnahai, lieu de résidence du gouvernement. Dans la nuit du 21 avril, quelques heures seulement avant les funérailles de Hu Yaobang, ils sont 10 000 à se diriger vers la place Tienanmen où ils s’installent. Et ce, en dépit de l’interdiction des autorités policières. Une délégation fait savoir qu’elle souhaite assister aux obsèques. Le 22, des étudiants demandent à voir Li Peng, principal opposant à Hu Yoapang, pendant que des manifestations dégénèrent en province.
Le 26, l’agitation bat son plein. Les étudiants fondent leur propre association et choisissent des représentants. Le lendemain, ils sont 50 000 à défiler dans la rue. Le mouvement gagne la province et les ouvriers se joignent aux cortèges, en fustigeant la corruption du régime et en protestant contre l’inflation, le chômage et le luxe dans lequel les cadres du PCC se sont installés. Le 12 mai, les étudiants entament une grève de la faim, place Tienanmen. Ils sont plus de 1 000, auxquels se rallient bientôt des délégations provinciales. À Pékin, des manifestations de soutien s’organisent, réunissant, à la mi-mai, plusieurs centaines de milliers de personnes.

Grève de la faim

Répression ? Solution négociée ? Le pouvoir est partagé. Le 19 mai, le réformiste Zhao Ziyang rend visite aux étudiants, prononce un discours qui se veut consensuel. Une annonce officielle est prévue le soir même pour trouver une solution pacifique. Las ! Mis en minorité par les partisans d’une ligne dure, conduite par Li Peng, Zhao Ziyang doit plier. Le soir même, le porte-parole du gouvernement décrète la loi martiale. Les soldats de la 38ème armée prennent position autour de la capitale, pendant que les étudiants dressent des barrages. Le 20 mai, ils reculent devant les manifestants pacifistes. S’ensuivent des heurts violents qui conduisent les militaires à écraser des manifestants restés sous leurs tentes.
Du 3 au 9 juin, une purge sévère est organisée à Pékin et dans tout le pays. Les sources occidentales et la Croix-Rouge chinoise déploreront 2 600 à 3 000 pertes. Ce qui vaudra à Zhao Ziyang de perdre son siège et de rester en résidence surveillée jusqu’à sa mort. Il sera remplacé par Deng Xiaoping. Des campagnes d’opinion suivront, tandis que les médias, pourtant favorables aux étudiants, seront mis au pas. L’idée de réforme sera renvoyée aux calendes grecques. Vingt ans après, les événements de 1989 sont toujours un sujet tabou en Chine.
Bruno Tranchant


Chronologie

- 15 avril : Mort de Hu Yaobang, ex-secrétaire général réformiste du PC chinois.
- 17 avril : 2 000 étudiants manifestent leur deuil place Tienanmen et demandent la démission du gouvernement.
- 19 avril : Attaque du siège du PC et résidence des dirigeants par 8 000 personnes. Interventions de la police.
- 21 avril : 200 000 manifestants sur la place Tienanmen.
- 27 avril : Entre 100 000 et 500 000 personnes manifestent dans Pékin contre l’éditorial du Quotidien du peuple de la veille, qui taxe le mouvement de « complot antiparti ».
- 13 mai : 2 000 étudiants entament une grève de la faim, place Tienanmen.
- 19 mai : Création d’une Union autonome des ouvriers de Pékin, qui se met aussitôt en grève.
- 20 mai : Loi martiale. L’armée intervient, mais sans armes.
- 31 mai : Le gouvernement organise une contre-manifestation.
- 4 juin : L’armée tire à vue. Cette bataille fera entre 300 et 3 000 victimes.
- 6 juin : Combats dans Pékin. Barricades et violents affrontements à Shanghai : 50 morts.
- 8 juin : L’armée occupe Pékin. Émeute à Hongkong.
- 9 juin : Deng Xioping, annoncé mort par la télévision taïwanaise, réapparaît sur les écrans.
- 15 juin : Premières condamnations à mort (1 500 arrestations environ).
- 20 juin : Premières exécutions officielles.


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