ps chevilly larue

Le socialisme et la tentation associative

vendredi 27 mars 2009

Le Parti socialiste s’est toujours employé à utiliser les associations pour véhiculer ses idées. Un entretien avec Denis Lefebvre, secrétaire général de l’OURS (Office universitaire de recherche socialiste), historien du socialisme, co-auteur avec Alain Bergounioux du Socialisme pour les nuls, paru fin 2008 aux Editions First.

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En France, le monde associatif est foisonnant et multiple, au moins depuis la loi de 1901 qui a consacré la liberté d’association. Comment le Parti socialiste s’y est-il impliqué depuis maintenant plus d’un siècle ?
Depuis ses origines, le Parti socialiste a toujours entendu s’implanter dans la société, pour faire passer ses idées, valoriser son action ses propositions, mais aussi pour gagner de nouveaux adhérents, et des électeurs. Le monde associatif permet tout cela à la fois, Ses méthodes sont variées. Ici, il le fait d’une façon claire et limpide, en brandissant haut et fort le drapeau du Parti. Là, il se comporte d’une façon plus subtile, en créant des associations sectorielles. Ailleurs, il s’investit dans des associations déjà existantes, pour les contrôler, quand il le peut, ou tout au moins pour y faire passer son message, ou pour empêcher toute dérive, toute récupération par les autres forces politiques.
Tout cela, bien sûr, ne se fait pas si simplement, selon les périodes, l’organisation et la force du Parti, sa force militante, son regard sur la société. Au gré aussi des objectifs qu’il se fixe. En effet, le Parti socialiste n’a pas la même démarche lorsqu’il s’érige en contre-société, ne se préoccupant que de son développement, ou quand il se fixe pour objectif d’arriver au pouvoir ou d’y rester quand il l’occupe. Pour schématiser, et pour prendre une période très contemporaine, son comportement est différent entre les années 1960 et le milieu des années 1970, avec d’un côté une SFIO pour qui le retour au pouvoir paraît lointain, et de l’autre un Parti socialiste qui, après le congrès d’Epinay, en 1971, se fixe comme objectif de conquérir l’appareil d’État…

Les années soixante-dix marquent-elles un tournant ?
À n’en pas douter. Elles voient se dessiner un important développement du mouvement associatif en France. Le Parti s’y intéresse tout particulièrement : un secrétariat national aux organismes associés et aux associations est même créé après le Congrès national de Pau, en 1975. Il est confié à Marie-Thérèse Eyquem. Sous des dénominations parfois légèrement différentes, cette structure sera maintenue ensuite, jusqu’en 1981. Ce secteur entend mobiliser les fédérations, non pour inciter les militants à créer des associations nouvelles, mais pour qu’ils s’investissent dans le tissu existant, comme on peut le lire dans des documents de l’époque. On constate aussi une mobilisation du réseau des élus socialistes, à travers la revue Communes de France.
La question prend une autre ampleur avec l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981 : des mesures significatives sont prises, autour de l’entrée au gouvernement d’André Henry en qualité de ministre du Temps libre, auquel succédera, en 1983 Edwige Avice. En juillet 1982, Communes de France consacre un dossier à « La vie associative, une des bases de la nouvelle citoyenneté ». L’ambition est de mise !

Le centenaire de la loi de 1901 constitue-t-il un temps fort dans l’action des socialistes ?
Bien sûr, et ils profitent même de l’occasion pour publier un livre blanc sur le monde associatif, qui balaie tous les aspects : l’éducation populaire, un enjeu de citoyen ; la vie associative et l’Europe des citoyens ; les pratiques associatives ; le bénévolat… Ce document atteste d’une évolution notable, au fil des décennies. Il reste que les associations sont devenues un élément incontournable de la vie sociale - et politique - de la France.
Le Parti socialiste ne s’en désintéresse pas plus aujourd’hui qu’hier, assimilant les changements successifs du monde associatif, et s’en servant : de l’animation d’un club sportif dans les années trente - à la fois contre-société et instrument de lutte contre les adversaires - au combat pour l’insertion sociale. De l’impulsion nationale au travail des élus locaux. Au-delà, on mesure aussi que le PS a toujours voulu utiliser les associations pour véhiculer ses idées, mais aussi comme réservoir de militants.

Propos recueillis par Bruno Tranchant

À chacun son identité

La revue Communes de France - qui va bientôt fêter ses cinquante ans… - a consacré de nombreux articles et dossiers à la question associative, s’efforçant toujours de lier la théorie à la pratique avec, dans les années 70, une novation par rapport à la période précédente : il faut désormais lutter pour améliorer le cadre de vie. Le monde associatif peut y contribuer. Vingt ans plus tard, la même revue consacrera une nouvelle évolution des socialistes, mettant en avant, pour les associations, la lutte contre l’exclusion et l’aide aux chômeurs.
Communes de France bien sûr suit au plus près les grandes réalisations menées par la gauche au pouvoir, dès 1981, et dans les années qui ont suivi. Le réseau des élus se mobilise, la revue publie nombre de reportages et d’enquêtes, autour d’exemples précis à travers la France, qui permettent aux édiles de poursuivre leurs réflexions sur la vie associative et son enjeu. En janvier 1997, on peut même dans la revue que ce secteur a « une légitimité sociale ».
À chaque période cependant, la revue entend montrer que ces deux secteurs - élus et associations - peuvent jouer un rôle considérable - équilibrant et dynamisant la vie locale - s’ils ne se concurrencent pas et s’ils conservent chacun leur identité.


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